La conjonction de trois facteurs majeurs – la défiance des acquéreurs, la paralysie du crédit bancaire et la désaffection des investisseurs – a plongé toute la chaîne de valeur du logement dans une zone de turbulence sans précédent. Les conséquences dépassent largement le cadre des entreprises du secteur : c’est aujourd’hui toute l’économie luxembourgeoise qui se retrouve fragilisée, dans sa capacité à loger, à produire et à investir.
Une double asphyxie pour les développeurs
Les développeurs immobiliers font face à une situation inédite, marquée par une double asphyxie.
D’une part, la fin des dispositifs de soutien public et la hausse des taux d’intérêt ont provoqué un net recul de la demande. Les acquéreurs – particuliers comme institutionnels – reportent leurs décisions, freinés par la perte de confiance et une incertitude réglementaire qui pèse sur la visibilité des projets.
D’autre part, les banques, désormais d’une prudence extrême, resserrent fortement l’accès au crédit, tant pour les acheteurs que pour les promoteurs. Résultat : des projets gelés, des entreprises fragilisées, et des équipes suspendues dans l’attente d’une reprise qui tarde à venir.
D’une crise sectorielle à un risque macroéconomique
Cette situation dépasse le cadre d’une simple crise immobilière. Elle représente un risque macroéconomique réel pour le Luxembourg.
Le secteur de la construction et du développement constitue un pilier essentiel du tissu productif national. Chaque projet stoppé, chaque emploi perdu, chaque investisseur découragé affaiblit un peu plus la dynamique du pays, à un moment où la croissance repose largement sur la vitalité du secteur résidentiel.
Pour la Section des Développeurs, cette période est cruciale. Nos membres jouent un rôle de maillon central entre les institutions, les investisseurs, les concepteurs et les usagers. Si ce maillon venait à se rompre, c’est toute la mécanique de la production de logements et d’infrastructures qui risquerait de s’effondrer.
Un appel à la confiance et à la coopération
Depuis près de vingt-quatre mois, la Section des Développeurs multiplie les initiatives pour maintenir un dialogue ouvert avec les acteurs publics et financiers. L’objectif est clair : rétablir un climat de confiance, encourager les mesures de soutien ciblées et faire reconnaître le rôle stratégique des développeurs dans la stabilité et la compétitivité du Luxembourg.
Car il ne s’agit plus seulement de défendre un métier : il s’agit de préserver une filière, un savoir-faire et une part essentielle de l’économie nationale.
Marché du logement neuf : la prudence persiste
Les dernières données du Ministère des Finances, croisées avec l’enquête interne menée par la Section des Développeurs, confirment un recul net de 42 % des ventes d’appartements neufs au troisième trimestre 2025. Ce ralentissement est principalement dû à la chute des ventes en VEFA (-55 %).
Des signaux faibles mais révélateurs
Les tendances observées traduisent un marché en pleine mutation :
- Retrait progressif des investisseurs privés, passés de 30 % des ventes au 1ᵉʳ trimestre à 19 % au 3ᵉ ;
- Légère hausse des appartements trois chambres et plus, signe d’une demande davantage orientée vers l’occupation propre ;
- Plus de la moitié des ventes de stock réalisées sans réduction de prix, preuve que les valeurs affichées restent globalement en phase avec la réalité du marché.
Malgré ces points de résistance, la crise de confiance demeure et continue de freiner les décisions d’achat comme la relance du neuf.
Le dispositif ProLog, censé soutenir le secteur, n’a pour l’instant eu aucun effet tangible, avec un seul nouveau dossier introduit au 3ᵉ trimestre.
Préserver la dynamique du pays
Face à cette situation, la mobilisation collective reste essentielle. La relance du logement neuf passe par un soutien concret à la production et par des mesures capables de restaurer la confiance des ménages, des investisseurs et des banques.
Plus qu’un enjeu sectoriel, il s’agit d’un choix de société : celui de garantir à long terme la capacité du Luxembourg à loger sa population, à investir dans l’avenir et à maintenir son attractivité économique.